Nous coulons des jours tranquilles à la Marina Quinta do Lorde. Ce petit port est très calme, un peu cossu, et les gens sont très sympas. Il y a juste un ship (= un magasin d’accastillage : le repère de Seb !), un club de plongée, le Captain’s bar et une épicerie où l’on commande son pain pour midi ! Depuis notre arrivée il ne fait pas très chaud, entre 19 et 26 degrés. Il y a souvent des nuages accrochés aux montagnes. Nous pouvons profiter d’une plage de galets et de la piscine privée d’un hôtel qui donne sur l’océan. Nous avons loué une voiture pour découvrir l’intérieur de l’île. Après avoir passé plusieurs jours en mer, nous sommes contents de crapahuter dans les montagnes ! Première randonnée à Balcoes : une promenade facile le long de la levada et une vue magnifique sur les montagnes. Les levadas sont des canaux d’irrigation construits il y a plus de 600 ans qui serpentent dans toute l’île, pour transporter l’eau des sommets vers les cultures situées en bas. C’est très vert, très fleuri, toutes les routes sont bordées d’agapanthes, d’hortensias ou de bougainvilliers. Nous sommes aussi allés à Funchal, la capitale, et port mythique pour les navigateurs (il est petit et il y a peu de places, donc on nous avait déconseillé d’y aller en bateau). Funchal a beaucoup souffert du récent incendie qui a ravagé les collines et brûlé près de 300 maisons. Au village de Monte, il y a une belle église, des guirlandes colorées en papier et on peut même redescendre à Funchal en traîneaux en osier ! (mais nous n’avons pas fait l’expérience car c’était un peu cher).
Du 19 au 24 août : récit de notre traversée de Gibraltar jusqu’à Madère
Jour 1 : le passage du détroit de Gibraltar. Le capitaine a calculé les heures de marée et les courants. On quitte la Marina d’Alcaidesa vers 10h30 et on s’arrête au port de Gibraltar pour faire le plein de gazoil, beaucoup moins cher là-bas. Puis on s’engage dans le détroit, peu engageant à vrai dire, la mer moutonne et il y a du vent. On zigzague entre les pétroliers et les porte-conteneurs amarrés là. Mais une fois passée la baie, il y a finalement peu de bateaux et le détroit est plus large que ce que j’imaginais. On avance tranquillement et on passe devant Tarifa. Vers 17h les difficultés commencent, on avance de moins en moins vite. Malgré nos prévisions, nous sommes face à des courants puissants, dans une marmite. Choc de la mer et de l’océan. Le voilier a une vitesse de 5,5 nœuds et pourtant on fait du sur place. On est comme sur un tapis roulant qui nous fait reculer. Pendant plus de 3h nous sommes devant le même paysage d’éoliennes. Impression étrange. Il y a peu de vent et pourtant la mer se soulève, poussée par des forces impressionnantes. A un moment le bateau se met à reculer. Le moral en prend un coup. Derrière nous, des rouleaux qui avancent, on pourrait presque surfer dessus. Faudra-t-il attendre la prochaine marée pour être libérés de ces courants ? Pendant combien de temps va-t-on encore reculer ? Vers 21h enfin on sort de cette zone de courant : 0,5 nœuds, puis 2 nœuds, ouf, c’est gagné, on avance de nouveau. On a 600 milles à parcourir pour rejoindre Madère.
Jour 2 : l’Atlantique. Au matin on ne voit déjà plus aucune côte. L’horizon à 360°. Autour de nous, que du bleu. Il y a du vent comme il faut, on avance à la voile, vent de travers. Mais une houle large nous prend sur le côté, c’est très inconfortable. Maëlle et Eléa sont de nouveau malades. Je nous croyais amarinés, mais non, pas encore. Je lutte pour ne pas être malade à mon tour, le cœur au bord des lèvres. Galettes de riz, biscottes, bananes… manger par petites bouchées. Mastiquer longuement. Regarder l’horizon. Vider les bassines à tour de bras (attention, les filles ont chacune leur couleur et je ne dois pas me tromper !). Réconforter autant que possible. Seb succombe à son tour. C’est donc cela l’Atlantique ! C’est notre bizutage de marins en herbe. On croise un énorme ferry. Mathilde de dire : « Eux ils sont tranquilles, je suis sûre qu’ils ne sentent même pas les vagues, ils sont bien confortables. Demain ils verront déjà la côte. Nous, c’est Koh-Lanta, on a le vent, les vagues, on survit sur le bateau ! » Un peu excessif peut-être… Ce n’est pas la croisière s’amuse, mais on rit bien quand même des blagues et des charades de papy !
Jour 3. Alors que je dors profondément dans le carré, une vague traîtresse m’éjecte de ma couchette et je tombe comme une masse : réveil brutal et douloureux. J’ai l’impression d’avoir pris un coup de poing dans le nez et j’ai le goût du sang dans la bouche. Finalement ce n’est pas si grave, je n’ai pas le nez cassé. Juste une entaille sur le haut du nez et un cocard à l’œil. Mais je suis sonnée. Tout ça parce qu’on n’a pas encore installé la toile antiroulis. Sébastien passe l’après-midi dans la cale pour essayer de réparer le moteur, en vain. Il est encore plus malade. Mathilde commence à faire des quarts. Dans la nuit, on est à la moitié du trajet. Durant mon quart, j’ai l’impression d’entendre le chant des baleines, mais non, ce n’est que le vent dans l’éolienne.
Jour 4. 7h. Papa vient me réveiller pour prendre mon quart. J’ai dormi 3h cette nuit. S’extirper de sa couchette. Enfiler sa salopette, sa veste, son harnais, son gilet de sauvetage. Nouvelle routine. Les nuits sont fraîches et au petit matin tout est humide, moite. Deux thés renversés. Apprendre à mesurer ses gestes, aller lentement. Se tenir tout le temps pour ne pas tomber. Ne pas se cogner ; j’ai déjà des bleus partout. Apprendre à patienter. Guetter la moindre trace de vie : un vol d’oiseau, des calamars et des bancs de poissons qui nagent à côté du bateau et sautent de temps en temps. On croise une tortue. Tout ce qui vient rompre la monotonie des vagues nous rend heureux ! Je prépare notre premier pain ce matin. A midi on peut humer la bonne odeur de pain chaud… et le déguster avec appétit ! Sébastien réussit à réparer le moteur.
Jour 5. J’ai très mal dormi. Mais il faut se lever quand même, faire son quart et s’occuper des filles. Bonne nouvelle : aujourd’hui elles ne sont pas malades et retrouvent l’appétit. On réussit même à potasser les guides de Madère. Le moral remonte. Si on a toujours du vent avec nous, on devrait arriver à Madère demain soir. La soirée finit bien avec un groupe de dauphins qui font de jolis sauts à côté du bateau. Je fais mon quart de nuit de 2h à 4h du matin. La mer est calme, le bateau glisse doucement. Je me sens bien. Mon corps suit les mouvements du bateau sans résistance. La nuit est noire, la lune est cachée par les nuages. J’aperçois des points brillants dans le sillage du voilier : du plancton luminescent. Comme des poussières d’étoiles tombées sur la mer.
Jour 6 : terre en vue ! Au petit matin on aperçoit la silhouette de l’île de Porto Santo. Madère n’est plus très loin ! Pour fêter ça, je fais de la cuisine avec Maëlle : un gâteau à la banane et une omelette au jambon. Nous sommes tous impatiens d’arriver. La côte volcanique est superbe. A 17h30 (heure locale – il y a une heure de décalage) nous arrivons au port, à la Marina Quinta do Lorde. Je saute sur le ponton ; que ça fait du bien de se dégourdir les jambes ! Enfin arrivés ! Une sorte de répétition générale avant la grande traversée. Il y a eu quelques moments difficiles, mais dans l’ensemble nous avons eu des bonnes conditions météo et le vent avec nous. Une bonne douche et un dîner au restaurant. Ce petit port est charmant ! Nous allons y rester une semaine et louer une voiture pour visiter l’intérieur de l’île.
Bye bye Gibraltar !
Dernier coucher de soleil sur la marina d’Alcaidesa. Demain nous mettons les voiles pour passer le détroit de Gibraltar ! Ensuite nous filons vers Madère, il faut compter 5 jours et 5 nuits de navigation. Donc silence radio pendant quelques temps ! Merci à tous pour vos commentaires sur le blog, j’adore vous lire ! Pour l’instant ma messagerie ne marche plus (grr…) donc je ne reçois pas de mails et ne peux pas vous écrire, heureusement que j’ai le blog pour garder le lien avec vous !
Le rocher de Gibraltar
Nous montons au fameux rocher de Gibraltar avec le téléphérique. Une ascension de 412 mètres en 6 minutes ! Là-haut vit une colonie de singes. Au final c’est un peu un attrape-touristes, le site est bétonné, sale et en ruines… Pas sûr que les singes soient très heureux de poser toute la journée pour des hordes de touristes, mais ils ne sont pas en captivité. Mathilde est déçue. Eléa s’émeut devant une maman et son bébé. Du haut du rocher il y a un beau panorama sur la baie de Gibraltar (en photo) et de l’autre côté, l’Afrique.
Le 16 août – A nous Gibraltar !
Nous pensions arriver à Gibraltar au petit matin, mais nous avons mis moins de temps que prévu et nous arrivons au milieu de la nuit. Il est 3h du matin. Il y a des cargos et des pétroliers partout, c’est impressionnant, ça clignote de tous les côtés ! On voit même les lumières de la côte Africaine, qui semble si proche. Nous nous mettons au port d’Alcaidesa, juste en face du rocher de Gibraltar. D’abord au ponton d’accueil, puis à notre place le matin. On parle beaucoup anglais sur les pontons !
Le 15 août – Nos premiers dauphins !
Depuis notre départ je scrute l’horizon dans l’espoir de voir des dauphins… et aujourd’hui, ça y est, ils se sont approchés du bateau ! Vers 19h on aperçoit un premier groupe, mais ils repartent aussitôt et je n’ai même pas le temps de sortir mon appareil photo. Peu de temps après, un autre groupe de dauphins arrive et reste au bon moment à jouer à l’étrave. L’excitation est à son comble ! Quelle joie ! Ils sautent d’un côté et de l’autre, se tournent dans l’eau, nous montrent leur ventre… On dirait qu’ils nous regardent ! J’espère que nous en verrons d’autres, mais les images de ces premiers dauphins resteront longtemps gravées dans nos mémoires.
Le 14 août à la Marina del Este
Hier, escale au port d’Almerimar, sans grand intérêt, si ce n’est la plage. Aujourd’hui nous avons continué notre descente vers le sud. Des serres à perte de vue… Navigation au portant sous génois, mais de la houle. Ce soir nous sommes à la marina del Este. Ce port niché au creux des rochers, fraîchement peint en bleu et blanc, ne manque pas de charme. Sur la photo à la une Maskali se trouve à gauche, serré entre deux gros bateaux à moteur… mais nous sommes contents d’avoir trouvé une place après avoir été refoulés au port de Motril. Demain matin, nous reprenons notre route vers le port de Gibraltar.
L’Alcazaba d’Alméria
Cette citadelle nous fait de l’œil depuis notre arrivée au port d’Alméria, et je ne voulais pas repartir sans l’avoir visitée ! L’Alcazaba est un palais d’origine arabe, érigé en 995 à l’emplacement d’une ancienne forteresse. A l’intérieur de l’enceinte, on se promène au milieu des jardins, bassins et fontaines. Du haut des murailles, on a un beau point de vue sur la ville et le port. Eléa a eu l’idée saugrenue de partir en tongs… erreur fatale qui lui a coûté de belles ampoules ! Aujourd’hui le vent s’est calmé, nous quittons le petit port tranquille d’Alméria pour continuer vers le Sud, un peu avant Gibraltar.
L’interview d’Eléa dans 1jour1actu
Après avoir fait la une du magazine 1jour1actu en juin, Eléa est interviewée sur le site Web. Retrouvez son témoignage sur 1jour1actu.com !
Au parc à Alméria
Après quelques jours de navigation, Maëlle retrouve avec grand plaisir les joies du parc ! C’est sans doute elle qui souffre le plus de ne pas pouvoir courir partout. Sur le bateau elle est attachée mais elle s’invente des parcours et ne peut pas s’empêcher de faire des acrobaties, un peu périlleuses à mon goût… Ici le parc est entouré de palmiers et de fleurs d’hibiscus, mais pas un poil d’ombre !