Bien arrivés au port de Mindelo à Sao Vicente ! Nous sommes restés quelques jours et nous repartons aujourd’hui faire un tour des autres îles de l’archipel du Cap Vert, puis nous reviendrons à Mindelo début novembre. Plutôt qu’un récit journalier, je vous propose un carnet thématique de cette traversée.

Navigation et météo. Nous avons eu de bonnes conditions pour traverser, mais il nous a manqué un peu de vent. Les alizés n’étaient pas franchement au rendez-vous. Nous avons donc navigué pour moitié à la voile (les premiers jours) puis au moteur. Maskali se comportait bien au portant (vent et mer venant de l’arrière, qui nous poussent) et avançait parfois à plus de 7 nœuds. Nous avons fait de jolis quarts de nuit éclairés par la pleine lune. La mer était peu agitée, avec parfois une longue houle caractéristique de l’Atlantique. On a également eu une mer d’huile durant les moments de pétole (pas de vent du tout). Sébastien a pu tester le spi : c’est toujours une manœuvre un peu délicate et tout a bien marché. Ce qui est étonnant, c’est que nous avons navigué en solitaire, croisant à peine un ou deux bateaux, alors que tous les voiliers du rallye sont partis quasiment en même temps. L’océan est vaste et nous avons tous suivi des routes différentes pour aller au même endroit.

Mal de mer. Nous avons tous testé (sauf papy qui n’est jamais malade) un nouveau système anti-mal de mer élaboré par l’un des participants du rallye, et qui est en train d’être commercialisé : e-trigg. Il s’agit d’une pastille en métal de la taille d’une pièce de monnaie à coller sur la peau. Le concepteur reste énigmatique sur le procédé, mais il n’y a ni produit chimique ni effets secondaires. Vous pouvez lire l’article de Gaëlle (de Balanec) sur le sujet. Sébastien pense qu’il s’agit d’un placebo, mais le fait est que ça a plutôt bien marché sur nous ! Seule Eléa a vomi 2 ou 3 fois, mais rien à voir avec le début et son temps de récupération était beaucoup plus rapide.

Sommeil. Ce qui est difficile à gérer durant les longues traversées, c’est le manque de sommeil. Il faut faire marcher le bateau de jour comme de nuit. Bien sûr nous avons le pilote automatique qui tient bien le cap (mieux que nous !) mais il faut faire la veille, c’est-à-dire surveiller qu’il n’y ait pas d’autres bateaux ou d’obstacles sur notre route. Nous sommes trois à bord à nous relayer, donc nos quarts ne sont pas très longs (nous changeons toutes les 2 h). Mais il faut réussir à dormir avant et après son quart, ce qui n’est pas toujours évident. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, un voilier n’est pas silencieux, il fait même beaucoup de bruit en navigation : il y a les vagues qui tapent sur la coque, les voiles qui claquent, le bois qui craque, et puis le bruit du pilote automatique ainsi que du moteur lorsqu’il tourne. Et à l’intérieur, les bruits sont amplifiés.

Avaries. Peu de problèmes à déplorer, heureusement ! La veille de notre arrivée, le moteur a ralenti soudainement. Les filtres à gasoil étaient très encrassés et Sébastien a dû les nettoyer et les changer. Ensuite le moteur est reparti comme avant.

Energie. Nous avons pu constater que nous étions autonomes en énergie à bord. Le bateau est équipé de panneaux solaires et d’une éolienne qui nous permettent d’alimenter les deux frigos, les appareils électroniques (GPS, radar, navtex, iPad avec les cartes pour la navigation…), les lumières, le dessalinisateur et le pilote automatique. Nous avons également un hydrogénérateur (hélice tractée derrière le bateau qui fait tourner une dynamo) que nous installons la nuit afin de remplacer les panneaux solaires qui ne produisent plus d’énergie. Pour limiter la consommation, nous éteignons un des frigos durant la nuit. Bien sûr quand nous sommes au moteur, celui-ci recharge les batteries.

Cambuse. Avant une traversée, il faut anticiper ! La veille du départ nous avons fait de grandes courses au supermarché et au marché local pour les fruits et les légumes, qui sont ensuite rangés dans des filets ou des bacs aérés. En général, j’essaie de préparer à l’avance de quoi manger pour le premier jour, par exemple un cake salé et des œufs durs, ou bien une salade de riz. Eléa a rédigé une suggestion de menus pour la semaine. La mer étant plutôt calme, j’ai réussi à cuisiner normalement, comme à terre : quiche, gâteau, salade composée… Nous avons fabriqué notre pain, cuit au four dans une cocotte en fonte. Le premier n’a pas beaucoup levé, manquait de sel et n’était pas assez cuit… mais mangeable ! Le second était mieux réussi. Il faut vérifier tous les jours que les fruits et les légumes ne s’abîment pas. Le 3e jour je me suis aperçue que certains commençaient à se gâter. J’ai donc adapté les menus pour ne rien gaspiller : poêlée de légumes, salade de fruits, gâteau à la banane… Les œufs se conservent très bien et longtemps hors du frigo à condition de les retourner tous les 3 jours pour éviter que le jaune se colle à la coquille. Au final, je ne me suis pas trop trompée au niveau des quantités, il nous restait de quoi manger à l’arrivée. L’enjeu pour la traversée de l’Atlantique sera de conserver des produits frais pour au moins 15 jours, voire 3 semaines. Je n’ai guère envie de manger des conserves…

Eau. En mer et dans les îles où il ne pleut que 2 ou 3 fois par an, l’eau douce est particulièrement précieuse. Pas question de la gaspiller ! Nous sommes partis avec le réservoir plein d’eau douce, c’est-à-dire 350 litres. A l’arrivée il nous restait un peu plus de 100 litres. Nous avons donc eu une consommation raisonnable, mais il faudrait être encore plus économe. Cette eau (en général non potable – cela dépend des ports) sert à se laver les mains et faire sa toilette, se brosser les dents, cuisiner (quand elle est bouillie), laver la vaisselle… Pour l’eau potable, nous avons un dessalinisateur à bord. Tous les efforts de Sébastien pour le réparer n’ont pas été vains ! Il a très bien fonctionné. Il nous permet de remplir une bouteille en 2 minutes et nous assure de l’eau potable à volonté ! Sébastien a également installé une pompe à eau de mer. On peut ainsi laver la vaisselle à l’eau de mer et la rincer à l’eau douce. L’eau de mer peut même être utilisée pour la cuisson du riz et des pâtes ou la fabrication du pain. Attention toutefois à utiliser moitié eau de mer, moitié eau douce, sinon c’est beaucoup trop salé et amer !

Déchets et recyclage. En bateau, un autre point important est la gestion des déchets. Si nous ne voulons pas être envahis de poubelles, il faut trier. Nous avons 5 types de poubelles à bord : une « normale », une pour les déchets organiques, et les autres pour les matériaux recyclables (papier/carton, plastique, métal, verre). Rien d’exceptionnel à cela, la plupart d’entre vous font également le même tri à terre, avec un coin compost au fond du jardin ou sur le balcon. Lorsque nous sommes au large, nous pouvons jeter tout ce qui est biodégradable. Tout le reste est conservé jusqu’à ce qu’on arrive au port où, en général, des bacs de tri sont prévus.

Pêche. Les filles sont devenues des championnes de la pêche ! Nous avons eu de la chance durant cette traversée, les poissons ont bien mordu. Nous avons attrapé des petites daurades, ce qui a bien agrémenté les menus. La technique pour les tuer rapidement est de les aveugler avec un chiffon et de leur verser un peu d’alcool dans les ouïes. Cuites au four, c’est un délice !

Animaux rencontrés. Nous avons croisé des dauphins à plusieurs reprises ! Dès le 2e jour, à 8h30 du matin, un groupe de dauphins s’approchent du bateau. Maëlle est la première à les voir ! Nous allons tous à l’avant de Maskali pour les voir jouer et sauter à l’étrave, il y en a au moins une dizaine. Ils profitent de la vague créée par le bateau pour surfer. Ils nous accompagneront pendant au moins une demi-heure ! Les autres jours ils sont restés moins longtemps, sauf le dernier jour, en approchant du Cap Vert, c’était un vrai festival ! Juste au lever du jour, des dizaines de dauphins sont venus, nous offrant un florilège de sauts extraordinaires, des vrilles, c’était incroyable ! Nous avons également croisé une grande tortue nageant tranquillement à la surface de l’eau. Et une multitude de poissons volants ! D’ailleurs, les dauphins faisaient des bonds pour les attraper en vol ! Nous avons vu des oiseaux, même très loin de la terre, c’était étonnant. Je n’ai pas pu identifier les espèces, mais il y avait des petits oiseaux noir et blanc qui ressemblaient à des hirondelles, et d’autres plus grands proches des goélands.

Occupations. Les filles ont un peu avancé leurs cours du CNED ce qui est une bonne chose. Elles n’ont pas encore tout à fait rattrapé leur retard… Un peu de lecture, regarder les guides touristiques, écouter de la musique. Du dessin, des découpages. Ce qui est regrettable, c’est que les filles passent beaucoup de temps à se chamailler, comme à terre, ça n’a pas changé ! Elles se plaignent parfois de s’ennuyer en mer, mais j’essaye de leur expliquer que c’est un luxe de pouvoir s’ennuyer, cela veut dire que tout le champ des possibles est ouvert, que l’on a du temps pour rêver ou méditer…

traversee_canaries_capvert_02 traversee_canaries_capvert_03 traversee_canaries_capvert_04 traversee_canaries_capvert_05 traversee_canaries_capvert_06 traversee_canaries_capvert_07 traversee_canaries_capvert_08 traversee_canaries_capvert_09 traversee_canaries_capvert_10 traversee_canaries_capvert_11 traversee_canaries_capvert_12

18 Comments

  • Daniel

    Ben c’est simple, hein ! suffit d’en attacher une à la traîne derrière le voilier et de la remonter dès que les requins arrivent… 😀 Le but n’est pas d’attrapper un requin, juste de prendre des photos !
    Super, la première coryphène ? Elle est petite. Ça peut faire deux mètres de long ces jolis poissons. et c’est très bon ! Essayez cru macéré dans citron vert, ail et piment… Normalement vous allez en manger pas mal pendant la grande traversée
    Le poisson volant aussi est minuscule… Dommage, c’est très bon aussi !
    Gros bisous.

  • Garés family

    Bravo pour l’école ! Et la vraie leçon de vie : l’ennui, c’est un luxe ! Alors profitez-en.
    Par rapport aux problèmes d’envois des interro dont tu parlais dernièrement : ils n’acceptent plus les envois postaux des copies ??? Ça serait plus simple…

  • bouscasse jacqueline

    Enfin de vos nouvelles (nous étions tellement impatients d’en avoir que, nous avons téléphoné aux deux Minous de St-Pé…), merci pour ces belles photos. Quel dommage qu’Eléa et Maëlle supportent si mal la mer, nous espérons que pour la grande traversée cela, se passera beaucoup mieux. Des grosses bises à vous tous de la part des « 3 J »

  • papi et mamie de saint pe

    bonjour les amours
    vous êtes très belles toutes bronzées.Nous trouvons que MAELLE a beaucoup grandi .
    Nous voyons de très beaux poissons c’est un excellent entrainement pour les langoustes futures .
    Nous nous régalons des photos qui nous permettent de voyager en même temps que vous .
    Que le pain a l’air appétissant .
    Nous vous embrassons très très fort
    papi et mamie

  • Thabuis

    Merci beaucoup pour ces belles photos
    Toutes les infos sur la nav sont une mine d’information et font rêver.

    Bravo et ne changez rien.
    Les enfants profitez d’être en mer pour étudier une fois à terre vous aurez tout le loisir de faire autre chose.
    Parole de papa

    Patrick

  • Je trouvais le temps long, plus de messages « admin » depuis La Gomera, sans doute un pb.
    C’est en me connectant directement sur le site que je découvre la suite … que je n’ai pas encore lue.
    A suivre …

  • Alexis

    Merci pour le journal de bord, ici il fait gris, et au moment où je vous lis, c’est lundi matin ! Beurk : (
    En tout cas c’est plus facile en lisant vos aventures : )
    Bon vent !
    Expression très appropriée !

  • bouscasse jacqueline

    Nous n’avions eu qu’une petite partie du texte car, nous n’étions pas à la maison. Aussi, après avoir dégusté (bravo ! à Séverine pour ce grand rapport), tous ces détiails, nous en bavons d’envie, plus les poissons, le pain, pouvons-nous nous inviter ????? Heureusement, que vous avez trouvé une solution pour le mal de mer, quant à Sébastien : placebo ou pas, le résultat est là… Puisque nous parlons résultat, hier après-midi J.J. a regardé le math de rugby sur la télé du camping-car (format idéal dit le « Tonton-Parrain »), qui avait lieu à Toulouse ; les Gallois contre les Toulousains, hélas match nul, si cela n’intéresse pas vraiment Sébastien qu’il le dise au « Papy » qui est peut-être un fan.
    Vendredi et samedi dernier, nous étions à Port-Leucate. 1ère nuit, vent très fort ; 2ème nuit : tam-tam jusqu’à environ 4 h du matin et reprise vers 7 h !!! C’est dommage.
    La 2ème semaine de novembre, nous devrions avoir la visite de « Papi et Mamie de St-Pé, nous les attendons avec impatience. A la prochaine. Bises des « 3 J ».

  • PHILIP J&J

    Nous avons eu le plaisir de voir Mamie NICOLE qui est venue apporter quelques livres pour les filles et également de très belles photos de l’équipage et de l’Ile de LANZAROTE. Vous êtes superbes !!!!!
    Nous avons hâte de découvrir les îles de Sao Vicente et Santo Antao et de profiter un peu de vous avant la grande traversée.
    Avez-vous réfléchi à ce que nous pourrions éventuellement vous apporter ?
    Plus que quelques jours pour vous embrasser très tendrement.
    J&J

  • Isa

    Coucou à tous,
    bonne idée d’avoir fait un récit par thématique ! Toujours aussi intéressant de te lire et de profiter des superbes photos.
    Je suis surprise de lire que vous avez encore le mal de mer… Je pensais que cela passait avec l’expérience et la navigation. Ravie que côté bateau et autonomie tout se passe bien.
    Effectivement le Cned par internet quand on n’a pas de connexion ou un wifi pas terrible, c’est la galère. Bravo aux filles d’avoir rattrapé un peu de leur « retard » dans l’avancée scolaire. Mais ce qu’elles sont en train de vivre vaut tous les cours du monde. Elles découvrent des cultures différentes, des paysages somptueux et feront sûrement des rencontres inoubliables. Les chamailleries entre sœurs et/ou frères -même si en tant que parents exaspèrent et désolent – font partie du jeu des fratries. 😉
    Ici, c’est les vacances ! Luc et Lise sont partis chez maman avec les cousins. Ils sont très contents !!
    D’énormes bises à vous tous
    Isa

  • Aurore

    Trop mignon le poisson volant !! Les filles, je suis impressionnée par vos talents de pêcheuses… Est ce que vous utilisez des vers ?….. beurk… Moi qui en suis phobique, si j’étais sur Maskali, je serais dépendante de vous pour ma survie !! 😉
    Ici, vos cousines se portent à merveille. Je leur parle de vous.
    Pleins de bisous
    Aurore

  • Daniel Pagés

    En ce qui concerne le sommeil, nous avions opté pour des quarts tournants de 4h. Certes c’est long, mais dans les alizés quand il ne fait pas froid ç’est pas trop génant. L’avantage (à 3) c’est que deux sur 3 dorment 8h d’affilée…
    Pour l’eau, se laver à l’eau de mer n’est pas gênant… il suffit de bien se sécher avec une serviette aussitôt après. Le sel reste dans la serviette. Bien sûr faut pas se sécher au soleil, sinon on devient un vrai marais salant avec plein de cristaux de sel sur la peau, et ça pique.
    J’avoue que la technique pour tuer les dorades me laisse pensif… 🙂
    Profitez bien du Cap Vert…
    Gros bisous

  • Merci pour toutes ces nouvelles passionnantes Séverine!! J’en apprends des choses! C’est vraiment amusant et presque irréel de penser que vous vivez cette vie là, là-bas, en mer, au loin…..Ici les premiers froids arrivent enfin (l’arrière saison a été magnifique!). Les 3 enfants ont repris l’école/collège après deux semaines de vacances bien remplies entre stage cuisine, théâtre, foot, basket et roller! Moi j’attaque la période très chargée de fin d’année avec Stampin’Up! pour mon plus grand plaisir!! Grosses bises

Répondre à Cécile Annuler la réponse.

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *